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mardi 18 avril 2006 |
494. … et obsessions maniaques (Chronique du temps qui passe 37) |
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(suite de l’article 493)
- Tiens, Lou, voilà la crème vanille.
- Pas dans le bol ! Je veux pas dans le bol ! Je veux la crème du magasin !
Ça y est, maman a mis ses promesses à exécution. Tout au long de la journée, elle m’avait prévenu qu’au souper, le dessert serait de la crème vanille qu’elle a faite elle-même.
Il n’y a rien à faire, je ne m’y fais pas, d’autant qu’elle m’est présentée dans un bol. On ne peux pas ainsi m’enlever tous mes repères. Un « petit pot », c’est à ma mesure, circonscrit à ma main qui me sert de guide pour assurer la pêche à l’inconnu. Un bol, c’est trop grand. Et puis, c’est nouveau. Et puis je n’aime que la crème vanille du magasin. Point, barre !
- Lou, tu n’as pas le choix, c’est moi qui l’ai faite, il n’y a donc pas de petit pot !
- Je veux pas. Je veux un yaourt !
- Non, Lou.
Je repousse le bol et me mets à criser, imposant ma voix à l’intégralité de l’espace sonore.
Papa rentre dans la partie.
- Lou, maintenant ça suffit. Ou tu manges la crème que maman t’as préparée, ou tu ne manges rien et tu te tais !
Pour toute réponse, j’en remets une couche :
- Tais-toi, papa ! Tais-toi ! Rien ! Je veux rien ! Je veux la crème vanille !
Sur le champs, papa se met à m’imiter, criant à la volée :
- Je veux pas ! Rien ! Rien ! Tais-toi papa !
Je fais semblant de ne pas l’entendre de sorte que nous sommes deux à gueuler dans le vide. A ma grande surprise, voilà que se rajoutent Maman, puis Eva et même sa copine, qui, de concert, portent la voix et répètent mes revendications. Je ne vous dis pas la cacophonie. Je me bouche d’abord les oreilles, puis éberlué, me tais et écoute. Ils sont devenus fous ! Les « Je veux » ceci ou cela résonnent en pagaille, lorsque Papa signe la fin de la récréation. Je ne peux réprimer un léger sourire amusé. - Tu vois, Lou ? Imagine qu’on fasse tous comme toi, dès qu’on a pas ce qu’on veut !
- …
- On n’a pas toujours ce qu’on veut, mon fils. Tu le sais très bien. On te le dit et le redit. C’est comme cela et pas autrement.
- Oui, mais je ne veux pas la crème vanille de maman, et je ne veux pas manger dans le bol.
Maman me rétorque :
- Tu dis n’importe quoi, Lou. Tous les jours, tu manges tes repas chauds dans un bol.
- Je veux pas.
- Et bien tu ne manges pas de dessert, c’est tout.
Là, son propos m’énerve. Je repousse une gueulante, aussitôt stoppée nette par la T.G.V.* de papa, vous savez, celle qui me tétanise. (* Très Grosse Voix) :
- Maintenant, ça suffit, Lou !
Le silence ainsi rétablit, il me met calmement et fermement les points sur les « I » :
- Bon, je vais être très clair, mon garçon : primo, tu cries encore une fois, et tu montes au lit. Suis-je clair ? Ensuite je vais calmement compter jusque trois. Si à trois, tu n’as pas mangé la cuillère de crème, on enlève le dessert. Tu m’as bien compris ?
Il ne me laisse pas le temps d’en placer une.
- Un !
- Je veux pas. J’ai peur…
Mes yeux se remplissent de larmes.
- Deux.
Je me mets à geindre :
- Papaaa !
- Désolé, mon bonhomme, je ne suis pas d’accord. Je ne peux pas te laisser être irrationnel à ce point. Il y a aucune raison d’avoir peur.
Maman complète :
- Irrationnel, ça veux dire : qui n’a pas de raison, qui n’a pas d’explication logique.
-J’ai… j’ai peur !
Je fonds en larme, tends mes bras pour qu’ils me câlinent.
- Pleure, mon petit Lou. Vas-y, sors ta tristesse. Ça ira mieux après.
Je libère mes vannes.
Il faut un quart d’heure de câlins, de palabres et autres variations émotionnelles pour qu’enfin j’émerge de mon angoisse.
Je mélange tout : la peur, la tristesse, la déception et la colère.
C’est si dur d’exprimer mes sentiments …
Comme c’est le statut quo à chaque invitation de prendre la cuillère, papa propose à nouveau son décompte , calme et déterminé.
Cette fois, je sens bien que je dois me décider.
J’accepte de manger les trois malheureuses cuillères qui m’étaient imposées, non sans appréhension et peur.
Leurs félicitations m’indiffèrent. L’expérience ne me plaît guère, et à eux non plus, car maman me fait une annonce solennelle :
- Tu sais quoi, Loulou ? Puisque c’est comme cela, à partir de demain, on va tous les jours changer de dessert.
- J’ai pas envie.
- Mais on ne te laisse plus le choix ! Il faut que tu apprennes à manger de tout.
Papa en rajoute une couche :
- C’est comme pour la musique, Lou. Pour le moment, tu adores « Tryo », « Katerine » et « Grand Corps Malade », et c’est trois genres très différents. La musique aussi est pleine de saveurs, de goûts… Et si on ne te les avait pas fait découvrir, tu ne les connaîtrais pas. Ce serait dommage, non ? Tu écouterais toujours en boucle Dick Annegarn comme quand tu avais deux ans. Il faut goûter pour découvrir, pour aimer.
C’était la semaine dernière, dans la maison des Ardennes.
C’était une de ces bousculades dans mes petites habitudes que mes vieux m’imposent à l’occase.
Depuis lors, maman a acheté plein de desserts différents.
Les quatre premiers jours, la panique et les refus furent au rendez-vous.
D’autant que non contente de me faire goûter un yaourt à la myrtille ou une crème à la pistache, maman s’est mise aussi à alterner les récipients : un jour un bol, le lendemain un petit pot, et même parfois, le transvasement en cours de séance culinaire, histoire de bien me montrer que le contenant n’a aucune importance.
La calme détermination de maman ne me laissait entrevoir aucune issue autre que d’accepter le met imposé, ou à défaut, de me passer de dessert.
Ainsi, j’ai du me résoudre à goûter différents desserts.
C’est comme pour les repas chauds, finalement !
- Mais oui que c’est bon la pistache ! A maman de répéter !
- Mais oui, que c’est bon la pistache. Allez, mange, sot !
Le jour de Pâques, malgré un refus de principe qui s’est prolongé jusqu’au goûter, j’ai même mangé un morceau de gâteau au chocolat.
article en miroir sur « Lettre à Lou »
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Par Bèrlebus :: mardi 18 avril 2006 à 19:36 :: Au jour, le jour
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:: rss
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Vos commentaires |
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oui ça me rapelle pleins de souvenirs, mais qu'est ce qu'on y laisse comme énergie , les crises de gab me touchaient direct le système nerveux central, résultat je criais encore plus fort que lui...il mange de tout mais j'ai cédé sur ses goûts musicaux très très eclectiques. Alors que l'emmanuel: il n'y a pas eu de combat à livrer, il cède très vite, trop vite.
Pour se battre, il faut être 2 alors Lou "continue le...combat!"
Amitiés et courage.
Fabienne. |
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Le mardi 18 avril 2006 à 20:03,
commentaire par
fabienne
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le monde est fait de savour, de gouts et d'inovation, c'est pas facile de se jeter dans l'inconnu, on a toujours peur, tu sais petit Lou, même les adultes ont peur de l'inconnu, tu as de la chance d'avoir des parents qui t'apprennes les choses gentillement, avec patience.
Kisu |
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Le mardi 18 avril 2006 à 21:44,
commentaire par
bernie
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Bonjour Lou,
La crème à la vanille de maman, c'est pourtant tellement bon. Bravo de nouveau à papa et maman pour leur patience, leur amour, leurs explications ... encore une fois, papa a essayé de te montrer qu'il ne faut pas crier, que l'on doit essayer, que tu ne dois pas avoir peur de ce qu'ils te proposent, tu sais qu'ils t'aiment et donc ne te veulent que du bien. Aujourd'hui, en arrivant au travail, j'ai du moi aussi gérer une colère d'une jeune fille, qui nous criait... je veux pas, j'ai pas envie, je veux maman ici et tout de suite... et à ce moment, j'ai justement pensé à ton papa qui crie comme toi et chez nous aussi, ça a marché, la jeune fille a finalement écouté nos explications et celà c'est bien passé par la suite. Comme quoi, ton histoire peut aussi nous aider, nous les professionnels !
Gros bisous à tous.
P.S: as-tu aussi goûté aux petits oeufs de Pâques ? |
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Le mercredi 19 avril 2006 à 00:15,
commentaire par
cayenne
:: email :: #
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BRAVO les parents, vous êtes "fortiches"... Beaucoup à votre place auraient baissé les bras et acheté les pots de crème!!! En fait les enfants essaient toujours et dans tous les domaines et si on laissent aller une fois on est pris pour tout le reste... Je crois qu'actuellement les gens préfèrent abdiquer que de se battre et faire le pourquoi du refus et de l'importance d'essayer "l'inconnu"
Lou, la vie n'est faite que d'essai et ce dans tous les domaines, et plus tu grandiras plus tu seras confronté à des défis, Il faut t'armer de patience, de courage et écouter papa et maman qui eux savent et feront tout pour que tu ne sois pas perturbé à tort... J'espère que malgré la pluie la semaine en Ardennes s'est bien passée...
Bizzzzzzzzzzz |
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Le mercredi 19 avril 2006 à 13:28,
commentaire par
ANDREE
:: email :: #
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Bon appétit la vie! Les papilles découvrent et Lou "s'ouvre"... |
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Le mercredi 19 avril 2006 à 16:17,
commentaire par
Valérie
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...Bonjour les habitués !
(jolies proses)
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Le mercredi 19 avril 2006 à 18:55,
commentaire par
Luc
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La crème à la pistache !!! Mais j'adooore !!!
Loulou suit les conseils de tes parents, ils savent vraiment ce qui est bon pour toi!
Bravo aussi aux parents, je suis en admiration une fois de plus.
Gros bisous Lou! |
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Le mercredi 19 avril 2006 à 20:27,
commentaire par
Lili
:: email :: #
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mon Dieu que votre histoire est belle...Même pr un pot de vanille j'en ai les larmes aux yeux. Et vous arrivez à tout, il ira loin grâce à vous. Vous êtes tous formidables! |
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Le jeudi 20 avril 2006 à 09:58,
commentaire par
pascale
:: email :: #
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bonjour Luc,
Merci pour tes écrits que je lis depuis près de deux ans...Ils m'ont donné reforce,refoi, pour croire aux miens...
20six.fr/quoisetur hébergera les écrits d'un vécu de douze ans d'autisme, ce sera au jour le jour pour recopier...en élagant juste un peu car j'ai tant de pages en tiroir! A bientôt! |
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Le jeudi 20 avril 2006 à 18:47,
commentaire par
Annick et Jean Sébastien
:: email :: site :: #
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continuez comme ça avec Lou il vous remerciera un jour |
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Le dimanche 14 mai 2006 à 11:16,
commentaire par
Justine
:: email :: #
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Il m'arrive parfois de me relire (si, si ! - réappréhender mes récits pour voir s'ils sont lisibles, cohérents, correctement ponctués - mon faible (?)
Après lecture d'un article, je relis alors les commentaires pour me plonger dans la perception que vous vous en êtes faite.
Un plaisir...
Les blogs peuvent être parfois un merveilleux moyen de communication.
Luc |
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Le dimanche 21 mai 2006 à 16:37,
commentaire par
Luc
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