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Lettres à Lou |
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Le regard d'un papa sur son petit prince pas comme les autres, sur la vie, l'éducation, l'amour.
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vendredi 12 novembre 2004 |
30. Princesse Eva. |
Mon Petit Prince,
Je voudrais te raconter ici la conversation que j'ai eu ce soir avec ta grande soeur Eva, dix ans. Je tiens a préciser que c'est avec son accord que j'ai rédigé cette lettre et qu'elle la saura lue par d'autres personnes.
Cela fait quelques jours que ta soeur cherchait la bagarre avec nous, ses parents. C'était d'autant plus étonnant que sa maman vient, il y a peu, de lui consacrer une journée entière sans toi comme nous essayons de le faire régulièrement, ainsi que deux soirées rien qu'à trois. Sans doute était-ce la conséquence du retour à la normale. Rien de grave, mais des petits détails qui ne pouvaient qu'amener à la confrontation. Ce qui arriva donc à quelques reprises.
Ainsi donc, au moment de venir lui dire bonsoir dans son lit, elle se mit à m'expliquer la longue discussion qu'elle venait d'avoir avec sa maman. Elle me dit alors ceci : - Tu vois papa, en ce moment, ma conscience est heureuse, mais mon inconscient est malheureux. Et comme je le contrôle pas, il essaye de me rendre malheureux. En fait, mon inconscient est jaloux parce que tu passes plus de temps à jouer avec Lou qu'avec moi. Et maman aussi. Je lui ai expliqué, par exemple, que j'étais – enfin pas moi, mais mon inconscient – jaloux du fait que quand t'as fini de jouer avec Lou, tu ne veux souvent pas jouer avec moi. Mais je te rassures tout de suite, papa, maman m'a expliqué que souvent, tu te forçais pour Lou, même si t'avais pas envie. Et que c'était parce que Lou, il a besoin de te toucher, de te parler pour être avec toi... Je l'ai interrompu. - C'est juste, sauf que je ne me force pas toujours. Ça m'arrive... Oui. Mais voix-tu, quand on est par exemple tous dans le salon, chacun occupé à lire ou regarder la télé, on sait que l'autre est là. Tandis que Lou, il ne le sait pas puisqu'il ne nous voit pas : si tu bouges pas ou ne communiques pas avec lui, c'est comme si t'es pas là. L'autre chose que je voulais te dire aussi, c'est qu'on pourrait jouer tous ensembles au lieu d'être chacun occupé dans son coin. - Oui mais attends... j'ai pas fini. Bref, ça m'a fait du bien d'en parler, parce qu'alors ma conscience prend le contrôle de mon inconscient qui n'en devient plus un. Mais tu sais, je sais que Loulou est handicapé (elle montre sa tête) et que vous ne le saviez pas quand vous l'avez fait et qu'il a beaucoup besoin de vous. - ...Oui, on en a déjà parlé de ça, hein, petite chatte. Mais concernant Lou, je ne suis pas d'accord. Il sera peut-être très intelligent... On n'en sait rien... mais il faut tout essayer, tout faire pour... et c'est cela qui prend un temps inouï. Et puis, il est pas bête, ton frère. Simplement, il avance à son rythme parce que sans la vue, tout devient compliqué à comprendre. Pour certaines choses, il a six ans, pour d'autres, il en a trois. Et c'est très bien ainsi...
Notre conversation a ainsi continué un bon quart d'heure. J'étais une fois de plus scotché par la maturité et le coeur "gros comme ça" de ta soeur. Aujourd'hui, tu n'as pas conscience du sacrifice qu'elle offre de bon coeur. C'est vrai qu'on la délaisse parfois, même si on y fait très attention. Mais les journées ne sont pas élastiques.
Je voulais donc lui rendre cet hommage, car elle le mérite bien. Et à la sagesse de sa maman, aussi. ...Et enfin, de bénir la communication qui nous permet de crever les abcès avant qu'ils n'explosent.
NDLA : ce jeudi 11 novembre, fut un jour bien rempli ! cfr. blog de Lou (post 326) et post 328 et post 329 |
Par Luc Boland,
à 19:01 :: Lettres à Lou
:: #45
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