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Lettres à Lou |
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Le regard d'un papa sur son petit prince pas comme les autres, sur la vie, l'éducation, l'amour.
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vendredi 11 mars 2005 |
37. Tel un saumon |
Mon Petit Prince,
La vie avec toi est faite de hauts et de bas, de bonnes et moins bonnes périodes, comme si avancer demandait du répit, un passage momentané par la régression. A nous de ne pas tomber dans la spirale négative, de ne pas nous laisser entraîner dans une surenchère négative. Il nous faut donc souvent nager à contre-courant, comme un saumon remontant le torrent. Trouver à chaque fois les sources cachées de ta colère, de ta confusion, de ta peur, ou plus simplement d'un refus de ta part. Mais hélas, nous n'avons pas le sens innée du saumon qui s'en revient pondre là où lui-même est né. Parfois on se perd dans des confluents, de fausses routes où tu nous entraînes, ne sachant plus où tu en es.
Par exemple, quand nous te mettons une échéance par rapport à une demande que tu formules, tu en viens à confusément refuser la proposition parce qu'elle ne s'inscrit pas dans le présent. De même, lorsque nous interrompons une activité qui t'occupe, et t'invitons à la poursuivre après le repas, tu finis, dans ton refus de venir à table, par également refuser la perspective de poursuivre l'activité après le dîner. Il nous faut alors détricoter une à une les raisons de ta colère, de tes refus, car tout se mélange alors dans ton esprit. On en vient parfois à nager en plein surréalisme, où l'humour, telle une bouée, parvient à te ramener à la surface.
Ainsi va souvent la vie avec toi. |
Par Luc Boland,
à 14:48 :: Lettres à Lou
:: #53
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lundi 7 mars 2005 |
36. Le respect |
Mon p'tit Lou,
Si je dois respecter ta différence, et ainsi m'adapter à toi, je dois aussi ne pas accepter tes exigences, et encore moins ta violence.
De même, à l'inverse, il nous faut t'apprendre à respecter notre différence et à t'habituer à ce monde inadapté à la cécité.
Si tu progresses pas à pas, à ton rythme, c'est au prix de multiples conquêtes, parfois paisibles mais obstinées, mais parfois aussi, au prix d'un combat au corps à corps.
Ainsi, quand tu te cognes en ayant oublié un obstacle, il arrive souvent que nous devions te tenir de toutes nos forces pour contenir ta violence. Tu te débats alors, voulant te cogner une fois encore, ou voulant nous mordre de rage et de douleur. Si l'agression dont tu te sens victime est légitime, ta réaction ne l'est pas. Quelles que soient la douleur, la tristesse ou la vexation !
La violence physique ne mène à rien. Elle est une solution extrême d'autodéfense lorsque l'intégrité physique est en jeu. Paradoxe. Car ton comportement, en ces moments de douleur, prend racine dans ce sentiment d'être agressé dans ton intégrité.
Décidément, rien est simple avec toi. Sans cesse tout reconsidérer. Ainsi, la seconde fessée que tu as reçue fut le fruit... de ces longues réflexions. Tu n'as pas la vue pour mesurer notre colère ou notre autorité. Certes, cela fait bien longtemps que nous modulons notre voix pour y substituer un froncement de sourcils, de grands yeux menaçants, un sourire attendri, une joie ou une satisfaction. Tu l'as même tellement bien compris que tu t'exprimes comme nous, imitant nos multiples variations de tons. Mais cela peut ne plus suffire, lorsque tu te fais violent. Quand bien même serait-ce par les mots. Des mots peuvent être extrêmement blessants. Et cela aussi, il faut que tu le comprennes.
Tu es une aventure humaine, hors norme. Et c'est cela qui nous nourrit. |
Par Luc Boland,
à 18:49 :: Lettres à Lou
:: #52
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