|
Lettres à Lou |
|
Le regard d'un papa sur son petit prince pas comme les autres, sur la vie, l'éducation, l'amour.
|
|
|
|
|
|
|
vendredi 12 décembre 2003 |
4. Voir ! |
Au fait, c'est quoi un mouton ?
Avec toi, pas question de le dessiner. Tu es aveugle. Un mouton est : un animal, un nuage, une vague, ou même un enfant "gentil".
C'est avant tout une image que chacun se fait d'une réalité qui nous a été montrée et nommée. Libre à chacun de l'imaginer ensuite dans le ventre d'un boa, dans une boîte, ou de l'ignorer. La réalité est codifiée par la science et le savoir.
Mais c'est oublier que la réalité est avant tout arbitrée par notre perception, nos sens.
Tous les animaux terrestres dominants ont comme point commun une vue exceptionnelle : que ce soient les rapaces, les félins, ... ou l'homme. Tous sont prédateurs et au sommet de la pyramide de leur évolution. En milieu marin, les animaux qui dominent les eaux sont ceux qui voient par leur sonar.
La raison en est toute simple, la visualisation (la constitution d'images dans notre cortex) est sans conteste le Sens dominant : Il est trop tard s'il faut toucher un ennemi potentiel pour savoir s'il va attaquer, Il est dangereux de devoir goûter une nourriture inconnue pour savoir si elle est comestible, Il est périlleux de devoir attendre de sentir l'odeur du péril pour pouvoir enfin réagir, Il est risqué de devoir entendre approcher le danger pour en être averti.
Avec la vue, on voit son ennemi avant même qu'il vous ait vu. On a le temps d'analyser, de comprendre et de réagir. La vue est le sens le plus développé, le plus "intelligent". Au point d'en écraser les autres.
La vue est devenue un instrument de paresse.
...Du succès des images, de la télévision. Pour qui n'aura jamais croisé un mouton de sa vie, une simple image lui suffira pour l'identifier. "Mais, je sais ce qu'est un mouton, j'en ai déjà vu un." Dira-t-on. Savoir, être, voir : trois verbes devenus indissociables.
Pourtant c'est l'ensemble des sens qui nous donneront notre propre représentation définitive du mouton. Quelqu'un aura été marqué par l'odeur pestilentielle, un autre par le bêlement, d'autres enfin, par la douceur de la fourrure. Chacun a donc sa représentation globale du mouton. (j'omets ici volontairement le goût du gigot !)
A cela, il convient de rajouter sa propre expérience relationnelle avec le mouton. Comme la tienne, lorsque ce mouton t'a bêlé dans l'oreille.
Mon mouton n'est donc pas le même que le tien, ni celui de mon voisin. Il suffit de comparer les images que chacun se sera construites dans sa tête à la lecture de ces lignes. Chaque représentation sera unique, mais toutes parleront de la même chose, basée sur le compromis visuel transcris en langage : un mouton est un mammifère à quatre pattes (...).
Tout ces propos paraîtront évidents pour un adulte, pourront être compréhensibles pour un grand enfant. Mais ils sont incompréhensibles à ce jour pour toi. A moins qu'au contraire, ta perception soit innée, comme l'instinct, et que cela justifie tes peurs. |
Par Luc Boland,
à 15:56 :: Lettres à Lou
:: #19
::
un commentaire
|
|
|
|
|
|